Le cerveau de votre enfant:

La version française du livre intitulé « The Whole-Brain Child » vient (enfin) de sortir en version française le mois dernier, sous le titre « Le cerveau de votre enfant », aux éditions « les arènes »:

Les auteurs:

  • Le Dr Daniel J.Siegel: un des experts mondiaux du cerveau de l’enfant. Diplômé de l’université d’Harvard, il est professeur de psychiatrie à l’université de Los Angeles, co-directeur du centre de recherches pour la Mindful Awareness et directeur de l’institut Mindsight.
  • Tina Bryson: docteur en psychologie et psychothérapeute pour les enfants et les adolescents, elle dirige l’éducation parentale et le développement à l’institut Mindsight et donne de nombreuses conférences à destination des parents, éducateurs et professionnels de l’enfance.

Cette version française est préfacée par Isabelle Filliozat, (que nous ne présentons plus…) auteure entre autre de « au coeur des émotions de l’enfant », ‘j’ai tout essayé », « il me cherche »…   

Ce livre se présente comme un « manuel d’éducation positive pour les parents d’aujourd’hui »:

Dans cet ouvrage, les auteurs nous présentent, de façon claire, imagée et illustrée de divers exemples concrets, un certain nombre de concepts fondamentaux, permettant d’apporter un éclairage nouveau aux comportements quotidiens de nos enfants. Il nous offre en parallèle 12 stratégies à mettre en place pour aider à nourrir le cerveau en pleine maturation de nos enfants, afin de favoriser leur croissance et leur développement. Il s’agit d’aider nos enfants à mieux se connaitre, mieux se comprendre, mieux gérer leurs émotions, développer leur empathie, leur capacité à prendre des (bonnes) décisions… Bref, les aider à être plus heureux et épanouis.

Les principes de base du cerveau global et l’importance de « l’intégration »:

Le cerveau est constitué de différentes parties qui ont chacune une fonction bien particulière. Pour faire très simple, l’hémisphère droit est associé aux émotions, et l’hémisphère gauche au raisonnement logique, tandis que le cerveau reptilien (partie inférieure) est lié à l’instinct, à la survie, alors que les aires cérébrales supérieures permettent de réfléchir à nos actes… Il y a donc à l’intérieur d’un même cerveau des zones aux caractéristiques très « contradictoires »: émotives/réflexives, irrationnelles/rationnelles…

La clé permettant d’évoluer sereinement, réside alors dans le fait de pouvoir  intégrer ces différentes parties ensemble. Il s’agit de « relier les divers éléments les uns aux autres pour créer un tout efficace ». C’est le rôle de l’intégration: « coordonner et équilibrer les différentes régions du cerveau ». 

Le manque d’intégration, également appelé désintégration est responsable des débordements émotionnels, des états de confusion, d’agitation, de colère, de crise, d’agressivité…. et nous mets en incapacité de répondre sereinement et de façon appropriée à une situation donnée.

C’est pourquoi il est essentiel d’aider nos enfants à utiliser efficacement la totalité de leur cerveau, en leur permettant « d’être intégrés horizontalement: le cerveau gauche logique doit collaborer avec leur cerveau droit émotionnel, ainsi que verticalement, de sorte que les aires cérébrales supérieures, permettant de réfléchir à leurs actes, s’accordent avec les parties inférieures, liées à l’instinct et la survie ».  

Voici une vidéo intitulé « le cerveau dans la main » qui illustre merveilleusement bien tout cela:

D’autre part, les dernières découverte en neurosciences ont permis de mettre en lumière une caractéristique que l’on ignorait jusque là: la plasticité du cerveau. Autrement dit, sa structure physique se modifie, évolue tout au long de la vie, en fonction des différentes expériences que nous vivons. Par nos interactions avec notre enfant et les expériences que nous lui faisons vivre, nous allons pouvoir influencer la croissance de son cerveau au quotidien vers l’intégration. Il s’agira dans un premier temps de  » l’aider à développer chacune des aires neuronales en lui donnant l’opportunité de les stimuler », puis d’« encourager leur intégration pour qu’elles fonctionnent efficacement ensemble ».

C’est dans cette perspective que Daniel Siegel et Tina Payne vont proposer 12 stratégies, permettant de favoriser le phénomène d’intégration dans l’existence de nos enfants et de la nôtre:

Pour faciliter l’intégration du cerveau gauche et du cerveau droit:

  • 1- « Se connecter et rediriger »: se connecter à l’émotion avec empathie (cerveau droit) et seulement ensuite convoquer le cerveau gauche pour apporter une réponse plus « logique » à la situation.
  • 2- « Nommer et apprivoiser »: Inciter l’enfant à verbaliser les problèmes, pour que le cerveau gauche donne du sens à l’expérience et apaise le cerveau droit qui se trouve submergé par l’émotion (pour les tout petits pré-verbaux, poser soi-même des mots sur son émotion). 

Pour faciliter l’intégration du cerveau d’en haut et du cerveau d’en bas:

  • 3- « Sollicitez-le (cerveau d’en haut) , ne le faites pas enrager » (ne pas provoquer cerveau d’en bas): dans une situation anxiogène, solliciter le cerveau supérieur pour aider l’enfant à réfléchir et faire des choix plutôt que provoquer le cerveau du bas qui fonctionne de façon impulsive et irréfléchi. 
  • 4- « L’utiliser pour ne pas le perdre »: offrir des opportunités à l’enfant d’exercer et donc de renforcer son cerveau d’en haut ( poser des questions de façon ludique du genre « que ferais-tu si? », proposer des histoires à terminer, le laisser faire des choix et prendre des décisions…). 
  • 5- « Bouger le corps pour ne pas perdre l’esprit »: Inciter l’enfant à faire des mouvements, de l’exercice physique car ils s’avèrent très efficaces pour retrouver un équilibre entre les deux niveaux du cerveau.

Pour faciliter l’intégration de la mémoire:

  • 6- « Utiliser la télécommande de l’esprit« : lorsque l’enfant rencontre des difficultés à relater une mésaventure, lui proposer d’utiliser une « télécommande interne » permettant de faire une pause dans son récit, revenir en arrière ou encore faire une avance rapide.
  • 7- « Cultivez les souvenirs« : aider l’enfant à exercer régulièrement sa mémoire (questions, jeux de mémoire, reparler d’évènements passés ensemble, lui parler de notre journée et l’inviter (sans le forcer) à nous raconter la sienne (exemple d’une question très sympa à poser au plus petits en sortant de l’école, qui leur plait beaucoup et évite le « jme rappelle pas »: « dis moi trois choses que tu as fait aujourd’hui à l’école, deux vrais et une fausse » ).  

Pour faciliter intégration des multiples parties du soi:

  • 8- « Laisser passer l’orage émotionnel« : toujours expliquer à l’enfant que les émotions ne sont que passagères et ne le caractérisent pas de façon permanente (un jeune enfant en proie à une émotion difficile, ne sait pas que celle-ci n’est que temporaire, d’où la nécessité de le lui rappeler chaque fois, puis l’inciter à réorienter sa pensée vers quelque chose de plus joyeux (d’autre part, il est préférable d’utiliser la formulation « je me sens triste », « je me sens en colère »… plutôt que « je suis triste », « je suis en colère »pour aider l’enfant à différencier son état du moment, de ce qu’il est.
  • 9- « SISP »: aider l’enfant à comprendre ses différentes Sensations, Images, Sentiments, Pensées, en l’encourageant à s’interroger: Sensations corporelles (as-tu faim, soif, froid?), Images mentales (que vois-tu dans ta tête lorsque je te parle de…?), Sentiments/Emotions (tu te sens frustré lorsque tu ne parviens pas à faire tenir ta tour, n’est-ce pas?), Pensées (que penses-tu que vous allez faire à l’anniversaire de ton copain demain?)…
  • 10- « Exercer sa claire conscience » (mindsight): aider son enfant à se calmer, s’apaiser, focaliser son attention sur l’idée de son choix, en lui offrant des outils (respiration, méditation de pleine conscience…). Le concept de mindsight (concept phare de Daniel Siegel qui a fait l’objet d’un autre livre) est ici très clairement expliqué et illustré à travers un excellent outil qu’est « la roue de la conscience » 

Pour faciliter l’intégration de soi et d’autrui:

  • 11- « Augmenter le plaisir d’être en famille« : passer du temps en réelle connexion avec ses enfants, créer un climat familial joyeux en rendant l’environnement le plus positif et ludique possible. (le jeu et l’humour étant les meilleurs alliés de l’éducation) 
  • 12- « Se connecter au travers du conflit« : profiter des situations difficiles, conflictuelles pour enseigner des compétences sociales et des principes relationnels essentiels (créer du lien, partager, respect de soi-même et d’autrui, empathie, patience…) 

Toutes ces stratégies sont extrêmement bien expliquées et systématiquement illustrées par des exemples de situations quotidiennes réelles et concrètes, ainsi que par des petites BD récapitulatives.

En fin de livre, vous pourrez retrouver un tableau récapitulatif de ces douze stratégies, en fonction des différentes étapes de développement des enfants ainsi qu’une dernière page à découper (ou photocopier) intitulé: « pense-bête à coller sur le frigo », dont voici un aperçu:

pense_bete

Mon avis:

Il s’agit d’un livre riche, clair, truffé d’outils et de ressources concrètes permettant d’offrir à nos enfants une éducation positive et d’en comprendre les ressorts. Et, même si nous connaissons déjà certaines stratégies proposées par les auteurs, les explications scientifiques qui les sous-tendent sont absolument passionantes et permettent de mieux comprendre les enjeux de ce que nous mettons en place. La parentalité positive et bienveillante ne peut dès lors plus être considérée comme une démarche intuitive mais bien comme une approche scientifique de l’éducation.

Seul petit bémol pour la page 86 du livre, dont je me serais bien passé. Les termes utilisés (« caprice », « stratégie manipulatoire », »cinéma ») me posent un réel souci, d’autant plus qu’il n’est nullement fait référence à l’âge des enfants en question, dans la situation (hypothétique) proposée. C’est à mon sens, incohérent avec le reste de l’ouvrage, et, même si je comprends ce que l’auteur à voulu exprimer, je trouve cela assez maladroit. Il essaie ici d’expliquer la différence entre « crise du haut » (« choix conscient de s’emporter ») et « crise du bas »(incapacité à contrôler son corps et ses émotions). Toutefois, n’ayant pas eu l’occasion de lire la version anglaise du livre, peut-être s’agit-il aussi d’un souci relatif à la traduction?…

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7 Comments

  1. Bonsoir, lorsqu’on a déjà lu les livre d’isabelle Filliozat, catherine Gueguen, Haim Ginott, Gordon,… Ce livre vient il apprendre de nouvelles choses? merci.

    • Bonjour Julie,

      Par rapport aux attitudes à adopter (accueil, écoute, acceptation, mise en mots…) pas nécessairement. En revanche, ce livre nous apprend la façon dont tout cela fonctionne et les répercussions positives de ces attitudes bienveillantes dans la construction du cerveau de l’enfant, et c’est un aspect tout à fait passionnant. Daniel Siegel y présente également son concept de « Mindsight »(« clairvoyance ») qui correspond à notre capacité humaine à percevoir de façon claire son propre esprit et comprendre celui d’autrui… ainsi que des outils de « mindsight » comme la roue de la conscience.

      Donc oui, je pense que vous y trouverez de nouveaux éléments venant compléter vos précédentes lectures 🙂

      Bonne journée

  2. « Caprice”, “stratégie manipulatoire”,”cinéma »… :((((((( Quel dommage…:(( Je ne suis plus enthousiaste ni pour acheter ce livre, ni pour le recommander aux amis qui ont des difficultés avec la bienveillance… J’ai peur que cela donne raison à leur compréhension des « caprices » et des « cinémas »

    • Bonjour Marina,

      Je te rassure, il s’agit seulement d’une demi-page (sur 244), sur la laquelle il explique la différence entre « crise du haut » et « crise du bas » en schématisant son propos pour le mettre à la portée de tous, avec ces quelques mots maladroits (à mon sens) mais en proposant des attitudes de résolution qui restent positives. Le reste de ce chapitre est par ailleurs tout à fait intéressant: il emploie une image très parlante, d’un « escalier mental » entre l’amygdale et les couches néocorticales… (une très bonne représention)
      C’est justement un livre qui n’est pas « culpabilisant » et explique de façon très rationnelle le pourquoi du comment. Donc tout à fait intéressant pour des personnes qui doutent encore des réels bienfaits de l’éducation positive et bienveillante 🙂

      Belle journée à toi 😉

  3. Merci pour la référence!
    Il a l’air intéressant en effet même si je note que certains passages laissent un peu à désirer 😉

    • Avec plaisir Maman psy 😉 N’hésitez pas à nous faire part également de vos impressions après lecture.

      Belle journée à vous 🙂

Laissez-moi un commentaire ! je vous répondrai !

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