Lorsque j’évoque la façon dont j’envisage l’éducation, dans le respect des besoins de l’enfant et de son intégrité physique et psychique, mes interlocuteurs semblent généralement tout à fait d’accord sur le fond. Toutefois, lorsque la question des punitions s’invite à la discussion, je perçois souvent de l’incompréhension et/ou du désaccord de la part de mes interlocuteurs.
Pour comprendre POURQUOI je considère ce système de « punition/récompense » inefficace et délétère pour les enfants, je vous invite à lire: « Entre le bâton et la carotte, je choisis le respect »
Pour le COMMENT, je vous propose ici des « solutions » alternatives à la punition:
Réfléchir aux besoins sous-jacents qui s’expriment à travers le comportement de l’enfant:
» Éduquer, c’est entendre le besoin, la raison derrière le comportement inacceptable, c’est avoir de l’empathie pour la cause » . Arnaud Deroo
♦ Derrière chaque comportement il y a un besoin sous-jacent: le comportement n’est que la manifestation visible, explicite de ce besoin.
Si l’on se contente de réprimer le comportement, non seulement le véritable problème à l’origine de ce comportement ne sera pas réglé, mais en plus on prend le risque d’augmenter le niveau de frustration et de colère de l’enfant qui ne se sentira ni entendu ni compris.
Quant à la punition, elle permettra sûrement de faire cesser le comportement problématique sur le moment, par peur/crainte des conséquences; Mais cela ne résoudra en rien le problème en profondeur et ne permettra pas à l’enfant de trouver en lui les ressources pour tenter de solutionner le problème…
Donc, non seulement la punition n’aura aucune vertu « éducative », dans le sens où il n’en apprendra rien, mais en plus cela va détériorer le lien de confiance avec le parent et la confiance en soi de l’enfant.
Offrir de l’empathie, du réconfort et des câlins à l’enfant:
« Plus l’enfant vit des expériences d’empathie, plus il devient sociable, et moins il développe des comportements agressifs et antisociaux » Nancy Eisenberg.
♦ Les câlins, le réconfort, le soutien, la compréhension, la douceur… sont les ingrédients essentiels pour établir une relation de confiance et permettre à l’enfant d’évoluer sereinement et de façon épanouissante. Offrir à l’enfant cette attitude empathique, soutenante et pleine de douceur va permettre de générer des molécules bienfaisantes et anti-stress:
- Ocytocine: amour, confiance, lien
- Dopamine: plaisir à vivre, motivation, créativité
- Endorphine: bien-être
- Sérotonine: humeur stable
Et, cela va permettre de booster la maturation du cerveau (lobes frontaux, circuits cérébraux), ce qui agira donc aussi sur les facultés intellectuelles, affectives et sociales…
Permettre à l’enfant d’exprimer ses émotions :
« Parler des émotions à un tout-petit renforce sa sociabilité naturelle » Célia Brownell
♦ L’expression des émotions est fondamentale: cela va permettre d’apaiser et de réguler le cerveau émotionnel, de calmer l’amygdale cérébrale (centre de la peur). La réévaluation de la situation va modifier les circuits neuronaux et l’impact émotionnel.
Les bébés et les jeunes enfants vont s’exprimer à travers le regard, l’expression du visage et l’expression corporelle. C’est alors à l’adulte de poser des mots, en proposant à l’enfant tout un panel d’émotions afin de l’aider à comprendre ce qu’il vit et pouvoir valider et accompagner son ressenti avec empathie.
Jusqu’à 5/6 ans le cerveau de l’enfant est encore en construction: le cortex préfrontal et les connexions avec le cerveau émotionnel ne sont pas du tout matures, il n’est donc pas en mesure de faire face à ses émotions.
Comprendre, accueillir et accompagner les émotions de l’enfant:
♦ Le jeune enfant n’est absolument pas en capacité de gérer seul les tempêtes émotionnelles qui le submergent régulièrement. Il a impérativement besoin de l’adulte pour l’accompagner, poser des mots sur ses ressentis et lui offrir le réconfort et les outils nécessaires à l’apaisement.
Voir mon article sur le sujet: ICI
Prendre en considération les étapes du développement psycho-moteur et cérébral de l’enfant:
♦ Il est important d’adapter ses attentes et ses demandes au développement de l’enfant. Il faut que les règles et les consignes soient appropriées et adaptées à l’âge et au stade de développement de l’enfant.
Mes attentes sont t-elles réalistes, justifiées, adaptés? Mes attentes sont-elles comprises par mon enfant? Sont-elles compatibles avec les siennes? Ses besoins sont-ils entendu et respectés?
Bien garder en tête que l’enfant n’est pas un adulte en réduction mais bien un être en construction. Attention donc à ne pas tomber dans une forme « d’adultomorphisme » en attribuant à l’enfant des intentions d’adulte.
Pour en savoir plus sur le développement cérébral et les émotions, c’est par ICI.
Montrer le bon exemple :
♦ Votre enfant vous observe au quotidien. Vous êtes son principal modèle. Alors faites en sorte d’avoir un comportement cohérent avec vos paroles. Il est compliqué de demander à un enfant de faire ce que l’on dit et non ce que l’on fait… Si vous jurez régulièrement, criez, passez beaucoup de temps devant les écrans… il sera difficile pour l’enfant de comprendre que vous puissiez le réprimander pour cela!
Favoriser des situations de partenariat:
♦ Sortir d’un sytème autoritaire fondé sur l’adultisme « je suis ton parent, je décide et tu obéis » pour une relation de partenariat. La relation parent-enfant n’est pas une relation basé sur un rapport de force mais sur un rapport de confiance et de respect mutuel. Il est important d’avancer main dans la main avec ses enfants en les rendant autant que possible acteur de leur développement et de leur choix. Nous sommes avant tout des guides: il s’agit d’accompagner, d’offrir des repères, un cadre rassurant et suffisamment contenant pour l’enfant, tout en lui laissant suffisamment d’espace de liberté pour avancer à son rythme et dans le respect de ses besoins et de son individualité.
Anticiper les éventuelles situations conflictuelles en prévenant l’enfant à l’avance:
♦ Il est important d’offrir à l’enfant une totale considération et de l’informer à l’avance de ce que l’on s’apprête à faire, aussi jeune soit-il. Prendre le temps d’expliquer, d’anticiper, de prévenir l’enfant à l’avance va lui permettre de se préparer et de mieux comprendre ce que l’on attend de lui.
Adapter l’environnement:
♦ Il est souvent bien plus simple d’adapter l’environnement à l’enfant que d’attendre de l’enfant qu’il s’y adapte. Si vous tenez très fort au vieux vase en cristal de mamie Ginette, déplacez le en lieu sûr plutôt qu’interdire à l’enfant d’y toucher…
Apporter les informations et explications nécessaires permettant à l’enfant de comprendre vos règles:
♦ Expliquer les raisons des règles/consignes de façon pédagogique et offrez lui différentes alternatives possibles. Toujours mettre davantage l’accent sur le champs des possibles que sur les interdits…
Offrir des alternatives plutôt qu’imposer:
♦ Rendre l’enfant acteur, lui permettre de se responsabiliser passe aussi par le fait de lui accorder votre confiance en lui permettant de faire des choix par lui-même. Evidemment, on s’adapte toujours à l’âge et au développement de l’enfant. Mais, offrir des choix ne veut pas dire laisser l’enfant seul face à des prises de décisions difficiles. Vous restez le guide et le garant de sa sécurité physique, psychique et affective; il est donc de votre devoir de rester présent, disponible, et d’offrir un cadre contenant et sécurisant à l’enfant. Et, bien sûr, savoir guider et/ou prendre les décisions lorsque cela est nécessaire et n’est pas du ressort de l’enfant.
Apprendre et permettre à l’enfant de réparer ses erreurs:
♦ Nous commettons tous des erreurs, enfants comme adultes. L’erreur est l’essence même de l’apprentissage. Blâmer l’enfant pour ses erreurs et le punir ne sera en rien constructif. En revanche, lui apprendre à réparer sera bien plus constructif et éducatif.
Utiliser l’humour et le jeu pour dédramatiser certaines situations:
» En allant à la rencontre des enfants dans leur monde de jeux, nous déverrouillons la porte qui nous donne accès à leur vie intérieure pour communiquer avec eux à coeur ouvert » (de coeur à coeur) Dr Lawrence Cohen
♦ L’humour est un outil absolument fantastique en matière d’éducation: n’hésitez pas en user et en abuser!
Pour en savoir plus sur le « parentage ludique », c’est par ICI
Trouver des solutions acceptables pour vous comme pour lui:
♦ Il ne s’agit pas d’une compétition avec un gagnant et un perdant. L’égo n’a pas sa place ici. Dans chaque situation délicate, prenez le temps de souffler quelques minutes et tenter de trouver une solution qui soit acceptable pour lui comme pour vous.
Prendre soin de soi:
♦ Il est nécessaire de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres. C’est un préalable indispensable. La bienveillance passe d’abord par soi-même. Il est important de se respecter et de rester à l’écoute de ses propres besoins, pour pouvoir ensuite offrir le meilleur à nos enfants, avec patience, disponibilité, empathie et respect…
Savoir être ferme (mais toujours juste), lorsque cela est nécessaire:
♦ Il n’est pas ici question de laxisme (-> Voir article)
Un enfant a besoin de repères, d’un cadre contenant et sécurisant. Il n’est pas question de laisser tout faire… Loin de là. Il s’agit de rester à l’écoute de son enfant, de ses besoins et de l’accompagner avec respect et bientraitance. Aucune punition n’est nécessaire pour élever ses enfants, bien que ce soit certainement une solution de facilité sur le moment.
Le plus important n’est-il pas l’épanouissement de nos enfants sur le long terme? Nous souhaitons tous que nos enfants deviennent de futurs adultes heureux, épanouis, empathiques et respectueux. Alors, tentons de leur offrir un accompagnement approprié et cohérent avec ces valeurs.
Le plus fatiguant avec les enfants, ce n’est pas se baisser, s’incliner, se courber… »c’est le fait d’être obligé de s’élever, de se mettre sur la pointe des pieds jusqu’à la hauteur de leurs sentiments, pour ne pas les blesser »… Janusz Korczak.
Pour conclure, il n’existe aucune recette toute prête ou méthode clé en main pour élever ses enfants dans la bienveillance. Je vous propose ici quelques pistes, mais il s’agit surtout d’un véritable changement de paradigme: il est nécessaire de changer notre regard sur l’enfant et d’accepter de remettre en question et/ou faire évoluer notre conception de la parentalité.
Accompagner ses enfants avec le souhait de les voir devenir de futurs adultes heureux, épanouis et libres (de penser, choisir, s’exprimer…) c’est accepter de nos enfants qu’ils puissent s’exprimer librement et ne pas les enfermer dans une relation de type dominant-dominé. Ce n’est donc pas tous les jours évident mais c’est sans nul doute le meilleur accompagnement que l’on puisse offrir aux petits êtres en construction que sont nos enfants…
3 Comments
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Je suis trop ravie de lire le contenu de cet article. Il y a du lourd dans tout ce qui s’est dit. Il est vrai que trop souvent nous laissons le stress nous envahir. Nous ne prenons pas trop le temps de comprendre ce qui se cache derrière le comportement de nos enfants. Pourtant, il est de notre devoir d’agir ainsi.
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