Le parentage ludique: pourquoi jouer avec son enfant?

« En allant à la rencontre des enfants dans leur monde de jeux, nous déverrouillons la porte qui nous donne accès à leur vie intérieure pour communiquer avec eux à coeur ouvert » (de coeur à coeur) Dr Lawrence Cohen, p.76 

J’ai découvert depuis peu le travail de Lawrence Cohen, un psychologue américain spécialiste du jeu des enfants et des thérapies par le jeu. Il anime des ateliers de parentage ludique pour parents, enseignants et professionnels de l’enfance et tient une chronique dans le Golden Globes. Il a notamment écrit le livre « playful parenting » traduit et distribué en France sous le titre de « Qui veut jouer avec moi » (éditions JC Lattès). J’ai adoré ce livre que j’ai trouvé complet, riche et truffé d’exemples concrets et pratiques, le tout écrit de façon simple et accessible à tous. J’en recommande vivement la lecture à tous les parents qui souhaitent resserrer les liens et mieux communiquer avec leur(s) enfant(s).

« Le parentage ludique fourmille de conseils pratiques pour exercer au mieux (et avec humour) notre métier de parent ».

  • Qu’est-ce que le parentage ludique:

Il s’agit d’une approche ludique de l’éducation qui s’inscrit pleinement dans le spectre de l’éducation bienveillante, et qui considère le jeu comme un élément essentiel permettant de renforcer ou rétablir le lien affectif et la relation entre parent et enfant: « Quand les liens se distendent – ce qui se produit sans arrêt – le jeu reste la ressource la plus efficace pour les resserrer ». (p.46)

Le jeu est un moyen particulièrement efficace de se (re)connecter avec son enfant. Il lui permet de développer la coopération, la confiance en soi, et l’aide à affronter le monde réel. Il reste « l’un des meilleurs moyens d’entrer en contact avec un enfant, de le sortir de son isolement ou de l’amener à modifier son comportement, jusqu’à ce que le lien et la confiance soient restaurés » (p.40)

Surtout, le jeu va permettre de répondre au besoin d’attachement de l’enfant, et va contribuer à remplir son réservoir d’amour, de sécurité, d’affection et  d’assurance, ce qui participe à la construction d’un attachement sécure, c’est à dire les bases d’une bonne sécurité intérieure. Et, ce moment de jeu va permettre aux parents de remplir également leur propre réservoir. 

 Jouer avec son enfant va permettre de remplir 3 fonctions essentielles: (p.26)

  1. se rapprocher ou resserrer les liens distendus (par une altercation, un conflits, des difficultés…) → se (re)connecter
  2. satisfaire son énorme besoin d’affection (et le votre) → remplir son réservoir 
  3. l’aider à récupérer à la suite d’un stress émotionnel → fonction cathartique 

 

  • Comment jouer avec son enfant?

 Pour être vraiment efficace, le parent doit jouer avec son enfant en tête à tête pendant un minimum de temps de ∼15min, idéalement pendant une heure. Il est nécessaire que le temps accordé à l’enfant soit exclusif et que le parent soit pleinement impliqué, sans interruptions et/ou autres distractions en parallèle (sans téléphone, ordinateur, télévision…). D’autre part, le parent doit se mettre à la hauteur de l’enfant et ne pas hésiter à « se lâcher » (en faisant le clown, en se roulant par terre…). C’est au parent de rentrer dans le monde de l’enfant: il est donc important de le laisser mener la barque et de suivre ses instructions. En le laissant gagner, inverser les rôles, inventer ses propres règles, diriger, on lui permet de prendre confiance en lui.  Ça peut être pour lui une occasion de rejouer des événements désagréables qu’il a pu vivre, des émotions négatives qu’il a pu ressentir et pendant lesquels il s’est senti impuissant, effrayé, rabaissé…  C’est une excellente forme de catharsis pour l’enfant (extériorisation des sentiments).

Mais, cette approche ludique ne se limite pas à ces moments dédiés au jeu. On peut l’appliquer à tout moment de la journée pour dénouer des situations conflictuelles, de refus, de colères ou de crises chez l’enfant. Le jeu et l’humour sont bien plus efficaces et agréables que le rapport de force, la supplication, les cris pour obtenir ce que l’on désire de son enfant (refus de s’habiller, d’aller prendre son bain, de se coucher, de partir à l’école, de partir du parc…)

  • Quelques exemples personnels : 

Pour le coucher:

Mon fils (3 ans) semblait avoir besoin d’un temps supplémentaire avant le moment de l’histoire. Il a alors institué un nouveau jeu qui consiste à construire une cabane avec des couvertures au dessus du lit puis de mettre un de mes pantalons pour construire une porte. Ensuite chacune de ses peluches « tapent » à la porte et demande l’autorisation de rentrer dans son lit, puis il décide de les laisser rentrer ou pas. Puis, il les installe bien confortablement dans son lit puis nous lisons l’histoire à tout ce petit monde. Enfin, un autre petit jeu ritualisé permet d’éteindre la lumière avec le sourire: dès que l’histoire est terminée je regarde la lumière avec un petit air coquin en lui disant que cette fois-ci « c’est moi qui vais réussir à éteindre la lampe en premier », alors il s’élance sur la lampe et l’éteint à toute vitesse, en me tenant les bras pour m’empêcher d’atteindre l’interrupteur.

Pour la préparation du matin

Lorsque mon fils refuse de s’habiller, il a pu m’arriver de me fâcher, de m’énerver → non seulement les résultats n’ont pas du tout été concluant puisque mon fils s’est d’autant plus braqué, mais en plus, cela nous a mis tous les deux de mauvaise humeur pour commencer notre journée!

Alors la solution ludique que j’ai trouvée, c’est de lui dire « bon… beh super! aujourd’hui, c’est moi qui vais gagner la compétition et je serai la première à être habillée » → résultat immédiat, mon fils arrive en courant et se dépêche de s’habiller pour être le premier. Il m’arrive aussi de faire semblant d’enfiler ses affaires, de lui demander les vêtements qu’il aimerait mettre en premier, s’il veut choisir tel ou tel tee-shirt tout rigolo qui le rend très beau, ou encore je m’adresse à lui sur des airs d’opéra…

Pour couper ses ongles:

Je donnais un petit nom rigolo à chacun de ses doigts et j’émettais des sons improbables dès que je coupais un bout d’ongles. L’appréhension première se transformait alors en un moment de rigolade et de plaisir, et surtout ses ongles étaient coupés! Aujourd’hui plus de soucis, c’est même lui qui me demande lorsqu’il trouve ses ongles trop longs mais il lui arrive encore de réclamer le petit jeu des ongles.

 – Pour l’aider à se « décharger « :

Lorsque mon fils semble avoir besoin de libérer un trop plein d’affects (il est énervé , pousse ou tape), je lui propose une activité permettant un contact physique intense qui lui permette pleinement d’extérioriser ses sentiments sans se faire mal, sans me faire mal, sans se culpabiliser de ce mouvement de colère et surtout en s’amusant. Comment? par une grosse bataille de polochons!

Il ne s’agit évidemment pas d’une liste d’exemples exhaustive de nos petits conflits solutionnés de façon ludique. Les idées sont souvent spontanées et  adaptées à la situation qui se présente. A force de pratiquer, et de voir les effets positifs, cela devient de plus en plus naturel et automatique et la vie de famille n’en devient que plus zen et décontractée. L’avantage de l’humour et du jeu c’est que chacun peut inventer ses propres jeux, règles et façon de faire. Rien n’est figé et déterminé et cela nous oblige à rester créatif, imaginatif et à retrouver un peu notre âme d’enfant…

 

 

 

 

 

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13 Comments

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  4. Je vais essayer de donner un nom à chaque petit doigt pour voir ! Actuellement je fais un bruit inexplicable pour chaque doigt, pour détourner un peu l’attention.

    Tes articles sont vraiment très instructifs.

    Je vais aller acheter ce livre qui a l’air très intéressant.

    • Merci beaucoup, n’hésite pas à revenir nous faire part des résultats de tes expériences, et de tes impressions de lecture.

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  6. Pour les ongles j’avais un couple ongle en forme de coccinelle et je grondais entre chaque ongle la coccinelle en disant « maintenant ça suffit! tu arrêtes de faire mal à ma file, sinon gare à toi ». Ca ne lui faisait pas mal , mais ça la faisait beaucoup rire.

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  11. bonjour, je découvre Babyboo avec émerveillement. je pratique souvent avec ma fille (5ans) des temps de « bataille » pour se détendre le soir après l’école. confrontée à sa grande frustration lors de la fin du jeu, on a mis en place un réveil, qui sonne à la fin du temps défini au début. Mais même avec la sonnerie, difficle pour elle d’arreter… un conseil? une astuce? merci.
    Marion

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